Une limousine hi-tech, un Pattinson (convaincant, il faut le dire) le cul calé dans un siège et des interlocuteurs qui se relaient pour entretenir des discussions floues à base de palabres qui n'ont pas pour but la transparence ; Cronenberg fait un peu peur au début de Cosmopolis en nous laissant redouter que le film ne contienne que ça pendant 1h40. Sorte de réflexion critique sur le capitalisme qui reste assez évasive (et du coup ne se mouille pas trop en arguments), phrases philosophiques balancées presque au hasard, branlette verbale à tout bout de champ...le ton est assez vite donné et si la forme évolue à un certain moment le fond reste sensiblement le même. J'ai tenu quand même jusqu'au bout de ce long-métrage qui demeure assez intriguant et prenant grâce à sa beauté plastique, et certaines de ses images floues et évocatrices justement, comme les fameux rats, ou cette obsession du coiffeur.
Cosmopolis sème ce qu'il faut pour maintenir le spectateur en éveil sans nécessairement faire l'effort de lui faire biter quoique ce soit ; la longue scène finale en est l'exemple type, avec ses répliques qui finissent par complètement s'emmêler dans le cerveau en un imbroglio philosophico-économique dont on peine finalement à saisir la substance, mais qu'on gobe jusqu'au bout, si l'on parvient à être hypnotisé par cet échange mystique entre Pattinson et Giamatti armés de leurs deux pétards. Richesse et complexité ou simple pose et jolie prose ? C'est là l'ambigüité du film de Cronenberg (qui n'a pas du tout l'air décidé à en dire plus que la caméra - cf ses récentes interviews) qu'on peut voir à sa guise comme un tas d'artifices sans fond ou comme une fresque aux images abstraites et parfois percutantes, relativement analysables, mais dont on peut se demander si elles sont présentées de la bonne manière. Car le film est compréhensible dans son ensemble, il a sa cohérence interne, ses thèmes et ses réflexions (à la manière du roman source, paraît-il) ; le bémol c'est que ses dialogues (99% du film) s'embourbent et finissent par sonner creux à défaut de l'être vraiment, et on se raccroche alors à ce qu'on peut. Car Cosmopolis n'oublie pas, heureusement pour nous, d'être du cinéma plutôt qu'une pièce de théâtre ratée qui aurait voulu un peu trop la jouer à la Beckett, la viscéralité et l'humour en moins. Dommage que Crony ne dépasse pas assez le cadre de l'exercice de style servant à caser ses répliques en bonne et due forme plutôt que de laisser libre cours à une inventivité qui aurait rendue la chose plus marquante.
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